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European Case Law Identifier: ECLI:EP:BA:2002:T052599.20020912
Date de la décision : 12 Septembre 2002
Numéro de l’affaire : T 0525/99
Numéro de la demande : 90906641.7
Classe de la CIB : C09K 5/04
Langue de la procédure : EN
Distribution : A
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Titre de la demande :
Nom du demandeur : The Lubrizol Corporation
Nom de l’opposant : (1) Exxon Chemical Patents Inc.
(2) RWE-DEA AG f. Mineraloel u. Chemie/
FUCHS DEA Schmierstoffe GmbH & Co KG
(5) CASTROL LIMITED
(6) ExxonMobil Oil Corporation
Chambre : 3.3.01
Sommaire : I. Les disclaimers fondés uniquement sur un document de l’état de la technique au sens de l’article 54(3) CBE n’appellent pas d’objection au titre de l’article 123(2) CBE.
II. La jurisprudence constante en la matière étant claire, il n’est pas nécessaire de saisir la Grande Chambre de recours.
Dispositions juridiques pertinentes :
European Patent Convention 1973 Art 54(3)
European Patent Convention 1973 Art 54(4)
European Patent Convention 1973 Art 84
European Patent Convention 1973 R 35(12)
Mot-clé : Nouveauté (oui) : état de la technique au sens de l’article 54(3) CBE – divulgation particulière exclue par disclaimers – divulgation générale non destructrice de nouveauté
Saisine de la Grande Chambre de recours (non)
Exergue :

Décisions citées :
G 0001/93
G 0002/98
T 0188/83
T 0170/87
T 0012/90
T 0623/91
T 0042/92
T 0863/96
T 0323/97
T 0934/97
T 1071/97
T 0351/98
T 0480/98
T 0025/99
T 0507/99
Décisions dans lesquelles
la présente décision est citée :
T 0451/99

Exposé des faits et conclusions

I. Le recours est dirigé contre la décision de la division d’opposition de révocation du brevet européen n° 0 422 185.

La division d’opposition a notamment estimé que les disclaimers contenus dans le jeu de revendications selon la requête principale et la première requête subsidiaire alors en instance n’étaient pas admissibles, au motif qu’ils n’excluaient pas expressément l’objet divulgué dans les documents

(5) EP-A-0 378 176 et

(30) EP-A-0 377 122

et que l’objet revendiqué selon la deuxième requête subsidiaire alors en instance était dépourvu de nouveauté par rapport à chacune des divulgations faites par les documents (5) et (30).

II. Par lettre du 7 août 2002, le requérant a déposé les jeux de revendications A, B, C et D contenant chacun des revendications selon une requête principale ainsi qu’une première, une deuxième et une troisième requête subsidiaire, soit au total seize requêtes différentes.

La requête principale du jeu B comportait 36 revendications, dont l’unique revendication indépendante s’énonçait comme suit :

“1. Composition liquide comprenant :

(A) une quantité majeure (une proportion supérieure à 50% en poids) d’au moins un hydrocarbure contenant du fluor et comportant un ou deux atomes de carbone, où le fluor constitue le seul halogène présent dans l’hydrocarbure contenant du fluor et

(B) une quantité mineure (une proportion inférieure à 50% en poids) d’un lubrifiant soluble qui est au moins un ester carboxylique d’un composé polyhydroxylé contenant au moins deux radicaux hydroxyle et caractérisé par la formule générale

R[OC(O)R1]n (I)

dans laquelle R représente un radical hydrocarbyle comptant jusqu’à 20 atomes de carbone, chaque substituant R1 représente indépendamment un atome d’hydrogène, un radical hydrocarbyle inférieur à chaîne droite, contenant jusqu’à 7 atomes de carbone, un radical hydrocarbyle à chaîne ramifiée comportant jusqu’à 20 atomes de carbone, ou un radical hydrocarbyle à chaîne droite possédant de 8 à 22 atomes de carbone, avec la condition qu’au moins un substituant R1 représente un atome d’hydrogène, un radical hydrocarbyle inférieur à chaîne droite comptant jusqu’à 7 atomes de carbone, ou un radical hydrocarbyle à chaîne ramifiée contenant jusqu’à 20 atomes de carbone, ou un hydrocarbyle contenant un acide carboxylique ou un ester d’acide carboxylique, et n est au moins égal à 2, où le radical hydrocarbyle peut contenir des hétéroatomes

à condition que

(a) le composant (A) n’est pas le 1,1,1,2- tétrafluoroéthane lorsque le composant (B) contient (i) 25% en poids de la composition de Mobil P51 (tétraester du pentaérythritol d’un mélange d’acides alcanoïques ayant de 7 à 9 atomes de carbone), avec une viscosité à 38°C de 25×10-6 m2/s, ou (ii) 16% en poids de la composition de Mobil P41 (triheptanoate de triméthylolpropane), avec une viscosité à 38°C de 15×10-6 m2/s ;

(b) le composant (A) n’est pas le 1,1,1,2- tétrafluoroéthane lorsque le composant (B) contient (i) 13% en poids de la composition d’un mélange ayant une viscosité à 38°C de 87×10-6 m2/s, comprenant 70% de P- 2000 (propylène glycol et oxyde de propylène jusqu’à un poids moléculaire de 2000) et 30% de Mobil P51, ou (ii) 20% en poids de la composition d’un mélange ayant une viscosité à 38°C de 4×10-5 m2/s, comprenant 30% de P-2000 et 70% de Mobil P41 et

(c) le composant (A) n’est pas le 1,1,1,2- tétrafluoroéthane lorsque le composant (B) contient (i) 9, 12, 17 ou 22% en poids de la composition d’un mélange ayant une viscosité à 38°C de 89×10-6 m2/s, comprenant 90% de CP700 (glycérine et oxyde de propylène jusqu’à un poids moléculaire de 700) et 10% de Mobil P51 ; (ii) 8, 19 ou 29% en poids de la composition d’un mélange ayant une viscosité à 38°C de 203×10-6 m2/s, comprenant 75% de EDA511 (éthylène diamine et oxyde de propylène jusqu’à un poids moléculaire de 511) et 25% de Mobil P41 ; (iii) 9, 11 ou 20% en poids de la composition d’un mélange ayant une viscosité à 38°C de 245×10-6 m2/s, comprenant 75% de EDA511 et 25% de Mobil P51 ; ou (iv) 18% en poids de la composition d’un mélange ayant une viscosité à 38°C de 78×10-6 m2/s, comprenant 70% de CP1406 (glycérine et oxyde de propylène jusqu’à un poids moléculaire de 1406) et 30% de Mobil P51.”

“13. Composition liquide comprenant :

(A) de 70% à 99% en poids de 1,1,1,2-tétrafluoroéthane et

(B) de 1 à 30% en poids d’un lubrifiant organique soluble, qui est au moins un ester carboxylique d’un composé polyhydroxylé contenant de 3 à 10 radicaux hydroxyle et caractérisé par la formule générale

R[OC(O)R1]n (I)

dans laquelle R représente un radical hydrocarbyle comptant jusqu’à 20 atomes de carbone, chaque substituant R1 représente indépendamment un atome d’hydrogène, un radical alkyle à chaîne droite comportant de 1 à 5 atomes de carbone, un radical alkyle à chaîne ramifiée contenant de 5 à 20 atomes de carbone, ou un radical alkyle à chaîne droite possédant de 8 à 22 atomes de carbone, avec la condition qu’au moins un substituant R1 représente un atome d’hydrogène, un radical alkyle à chaîne droite contenant de 1 à 5 atomes de carbone, ou un radical alkyle à chaîne ramifiée comportant de 5 à 20 atomes de carbone et n est un nombre entier dont la valeur varie de 3 à 10, où le radical hydrocarbyle peut contenir des hétéroatomes

à condition que

(a) le composant (A) n’est pas le 1,1,1,2- tétrafluoroéthane lorsque le composant (B) contient (i) 25% en poids de la composition de Mobil P51 (tétraester du pentaérythritol d’un mélange d’acides alcanoïques ayant de 7 à 9 atomes de carbone), avec une viscosité à 38°C de 25×10-6 m2/s, ou (ii) 16% en poids de la composition de Mobil P41 (triheptanoate de triméthylolpropane), avec une viscosité à 38°C de 15×10-6 m2/s ;

(b) le composant (A) n’est pas le 1,1,1,2- tétrafluoroéthane lorsque le composant (B) contient (i) 13% en poids de la composition d’un mélange ayant une viscosité à 38°C de 87×10-6 m2/s, comprenant 70% de P- 2000 (propylène glycol et oxyde de propylène jusqu’à un poids moléculaire de 2000) et 30% de Mobil P51, ou (ii) 20% en poids de la composition d’un mélange ayant une viscosité à 38°C de 4×10-5 m2/s, comprenant 30% de P-2000 et 70% de Mobil P41 et

(c) le composant (A) n’est pas le 1,1,1,2- tétrafluoroéthane lorsque le composant (B) contient (i) 9, 12, 17 ou 22% en poids de la composition d’un mélange ayant une viscosité à 38°C de 89×10-6 m2/s, comprenant 90% de CP700 (glycérine et oxyde de propylène jusqu’à un poids moléculaire de 700) et 10% de Mobil P51 ; (ii) 8, 19 ou 29% en poids de la composition d’un mélange ayant une viscosité à 38°C de 203×10-6 m2/s, comprenant 75% de EDA511 (éthylène diamine et oxyde de propylène jusqu’à un poids moléculaire de 511) et 25% de Mobil P41 ; (iii) 9, 11 ou 20% en poids de la composition d’un mélange ayant une viscosité à 38°C de 245×10-6 m2/s, comprenant 75% de EDA511 et 25% de Mobil P51 ; ou (iv) 18% en poids de la composition d’un mélange ayant une viscosité à 38°C de 78×10-6 m2/s, comprenant 70% de CP1406 (glycérine et oxyde de propylène jusqu’à un poids moléculaire de 1406) et 30% de Mobil P51.”

III. La procédure orale a eu lieu le 12 septembre 2002.

IV. Les intimés ont invoqué le défaut de clarté des revendications, au motif que le brevet en litige n’indiquait pas comment les données relatives à la viscosité contenues dans les disclaimers avaient été mesurées et que la portée des revendications ne pouvait pas être définie sans ambiguïté en raison des désignations commerciales utilisées dans les disclaimers.

Ils ont soutenu en outre que l’objet revendiqué n’était pas nouveau par rapport aux documents (5) et (30), étant donné que les esters décrits dans ces documents se chevauchaient dans une large mesure, que les compositions revendiquées étaient divulguées par l’enseignement combiné des revendications 4, 5, 7 et 8 du document (5) et que les compositions comprenant du 1,1,1,2- tétrafluoroéthane et une quantité mineure de tétraheptanoate de pentaérythritol étaient divulguées dans le document (5). A cet égard, ils ont argué qu’il ne suffisait pas d’exclure des exemples particuliers du document (5) par des disclaimers pour exclure toute la divulgation faite par le document.

Les intimés ont également contesté la nouveauté de l’objet revendiqué par rapport au document

(2) US-A-2 807 155

en combinaison avec le document

(3) US 19 265 (brevet de redélivrance)

auquel il est fait référence dans le document (2).

Enfin, l’admissibilité du disclaimer a été remise en question à la lumière de la décision T 323/97 en date du 17 septembre 2001 (JO OEB 2002, 476).

V. Le requérant a allégué que les revendications 4, 5, 7 et 8 du document (5) n’étaient pas dépendantes les unes des autres et que leurs objets ne pouvaient donc être lus ensemble pour contester la nouveauté. Il a ajouté que l’objet divulgué par les documents (5) et (30) était expressément exclu par les disclaimers (a), (b) et (c).

Il a en outre fourni une copie du procès-verbal de la procédure orale qui s’est déroulée le 12 juin 2002 dans le cadre de la décision T 507/99, où il était indiqué que la Chambre de recours 3.3.5 saisirait la Grande Chambre de recours d’une question sur l’admissibilité des disclaimers.

VI. Le requérant a demandé que la décision attaquée soit annulée et que l’affaire soit renvoyée à la première instance pour poursuite de la procédure sur la base de la requête principale contenue dans le jeu de revendications B déposé par lettre du 7 août 2002.

Les intimés ont demandé que le recours soit rejeté.

Motifs de la décision

1. Le recours est recevable.

2.1 Modifications, disclaimers et article 123(2) CBE

2.1.1 Selon la jurisprudence constante des chambres de recours, il peut être admis, et conforme à l’article 123(2) CBE, dans des circonstances exceptionnelles, d’exclure une divulgation antérieure particulière de l’invention revendiquée dans une revendication donnée en ajoutant un disclaimer à celle-ci, même si la demande initiale ne fournit pas elle-même de base à une telle exclusion, à condition que :

(1) Sans le disclaimer, l’antériorité détruirait la nouveauté de la revendication (cf. La Jurisprudence des Chambres de recours de l’Office européen des brevets, 4e édition 2001, III.A.1.6.3, et notamment décision T 1071/97 du 17 août 2000 citée, point 3.2 des motifs, décision T 934/97, point 2.3 des motifs et décision T 25/99 du 15 mai 2002, point 2.3 des motifs).

(2) Le libellé du disclaimer se fonde clairement et sans ambiguïté sur la divulgation antérieure (voir par exemple décision T 1071/97 susmentionnée).

(3) La divulgation antérieure est fortuite en ce sens qu’après introduction du disclaimer, elle n’est plus pertinente pour l’appréciation de l’activité inventive (voir par exemple décisions T 170/87, JO OEB 1989, 441, point 8.4.4 des motifs et T 863/96 en date du 4 février 1999, point 3.2 des motifs).

(4) Le disclaimer ne revient pas à introduire une caractéristique apportant une contribution technique qui conférerait un avantage injustifié au titulaire du brevet, par exemple en créant une sélection inventive (voir par exemple décisions T 25/99 et notamment G 1/93 (JO OEB 1994, 541)).

2.1.2 Les disclaimers ne sont pas mentionnés dans la Convention sur le brevet européen, et ce ni dans ses articles, ni dans ses règles. La Convention n’a pas été conçue comme un texte exhaustif, mais laisse plutôt à l’Office européen des brevets le soin de développer sa propre pratique en conformité avec la Convention telle qu’interprétée par les chambres de recours. La jurisprudence constante admettant des disclaimers pour exclure des divulgations antérieures particulières dans les circonstances exceptionnelles étroitement définies ci- dessus a été considérée comme conforme à l’article 123(2) CBE par la Grande Chambre de recours dans sa décision G 1/93, qui énonce (points 16 et 17) :

“16. La question de savoir si l’adjonction d’une caractéristique non divulguée, qui limite l’étendue de la protection conférée par le brevet tel que délivré, est contraire ou non à la finalité de l’article 123(2) CBE, à savoir empêcher un demandeur d’obtenir un avantage injustifié en bénéficiant d’une protection par brevet pour un élément qu’il n’avait pas dûment divulgué, voire même pas inventé à la date de dépôt de la demande, dépend des circonstances. Si une telle caractéristique ajoutée, bien que limitant l’étendue de la protection conférée par le brevet, devait être considérée comme un apport technique à l’objet de l’invention revendiquée, elle accorderait au titulaire du brevet, de l’avis de la Grande Chambre, un avantage injustifié contraire à la finalité susmentionnée de l’article 123(2) CBE. Par conséquent, une telle caractéristique constituerait un élément ajouté au sens de cette disposition. Un exemple typique de ce cas de figure semble se présenter lorsque la caractéristique restrictive crée une sélection inventive non divulguée dans la demande telle que déposée ou qui ne peut en être déduite d’une quelconque façon. En revanche, si la caractéristique en question ne fait qu’exclure de la protection une partie de l’objet de l’invention revendiquée, couvert par la demande telle que déposée, on ne peut raisonnablement considérer que l’ajout d’une telle caractéristique accorde au demandeur un avantage injustifié. De même, les intérêts des tiers ne sont pas lésés (cf. point 12 ci-dessus). De l’avis de la Grande Chambre, si l’on interprète correctement l’article 123(2) CBE, une telle caractéristique ne doit donc pas être considérée comme une extension de l’objet au-delà du contenu de la demande telle qu’elle a été déposée au sens de cette disposition. Il s’ensuit qu’un brevet contenant une telle caractéristique dans les revendications peut être maintenu sans contrevenir à l’article 123(2) CBE, ni donner lieu à un motif d’opposition selon l’article 100c) CBE. La caractéristique étant maintenue dans les revendications, il ne saurait pas davantage y avoir transgression de l’article 123(3) CBE.

17. La question de savoir si une caractéristique restrictive doit être considérée comme un élément ajouté au sens de l’article 123(2) CBE ne peut bien entendu être tranchée qu’au cas par cas, sur la base des faits de l’espèce. “

2.1.3 La Chambre se rallie à la jurisprudence constante citée au point 2.1.1 ci-dessus et estime qu’elle constitue l’interprétation de la CBE qu’il convient d’appliquer dans la présente espèce. Les réserves (a), (b) et (c) formulées dans la revendication 1 sont des disclaimers visant à exclure de l’étendue de la protection l’objet particulier du document (5), qui n’est une antériorité qu’au sens de l’article 54(3) CBE et qui, en vertu de l’article 56 CBE, seconde phrase, n’est pas pris en considération pour l’appréciation de l’activité inventive. C’est notamment eu égard à de tels documents visés à l’article 54(3) CBE qu’il est clairement nécessaire, aux yeux de la Chambre, que les demandeurs puissent rétablir la nouveauté de l’objet revendiqué au moyen d’un disclaimer fondé uniquement sur le document visé à l’article 54(3) CBE, et non sur leur propre divulgation initiale. Le demandeur ultérieur n’aura normalement pas eu connaissance de la demande antérieure réputée constituer l’état de la technique au sens de l’article 54(3) CBE, et on ne peut attendre de lui qu’il ait délimité de manière appropriée sa demande par rapport à cet état de la technique inconnu. Le contraindre à se fonder uniquement sur une limitation donnée divulguée à l’origine dans sa propre demande pour opérer une distinction avec cet état de la technique signifierait que le demandeur ultérieur risque de se trouver dans l’impossibilité de revendiquer une partie de l’objet initial de sa demande, même si elle est nouvelle par rapport à ce qui est réputé constituer l’état de la technique. Même s’ils sont un remède quelque peu artificiel, les disclaimers semblent offrir l’unique solution appropriée au problème non moins artificiel causé par les dispositions de l’article 54(3) et (4) CBE définissant ce qui est réputé constituer l’état de la technique.

2.1.4 Comme l’a relevé la décision T 351/98 du 15 janvier 2002, au point 45 des motifs, insister trop littéralement sur une base précise dans la divulgation initiale aux fins de l’article 123(2) CBE, c’est-à-dire interdire tout disclaimer fondé uniquement sur l’état de la technique, aurait pour effet d’étendre les dispositions applicables aux publications réputées comprises dans l’état de la technique au sens de l’article 54(3) CBE à des éléments qui n’ont pas été divulgués dans les demandes antérieures. Cela ne semble pas être conforme à l’intention explicite du législateur. Admettre les disclaimers dans une telle situation réalise un équilibre plus équitable entre les exigences des articles 54(3) et (4) et 56 CBE, d’une part, et de l’article 123(2) CBE, d’autre part.

2.2 Saisine de la Grande Chambre de recours

2.2.1 Les intimés ont contesté l’admissibilité des disclaimers (a), (b) et (c) eu égard à la décision T 323/97. Malheureusement, le message juridique que cette décision entend transmettre n’apparaît pas clairement. Au vu des faits de l’espèce soumise à la chambre, l’état de la technique sur lequel se fondait le disclaimer n’était pas destructeur de nouveauté (cf. point 2.1 de la décision T 323/97) et demeurait un document devant être pris en considération pour apprécier l’activité inventive. Selon la jurisprudence constante, un disclaimer fondé sur un tel état de la technique n’est pas admissible (cf. point 2.1.1 ci-dessus). Dans la mesure où la décision T 323/97 se borne à affirmer que les disclaimers fondés uniquement sur l’état de la technique ne sont pas admissibles dès lors que l’état de la technique n’est pas destructeur de nouveauté et/ou qu’il reste pertinent pour l’appréciation de l’activité inventive, la Chambre est d’accord. Toutefois, la décision n’est pas pertinente pour la présente espèce.

2.2.2 Or, le point 2.4 de la décision T 323/97 pourrait aussi être considéré comme énonçant l’idée plus générale selon laquelle les disclaimers fondés uniquement sur l’état de la technique contreviennent en toutes circonstances à l’article 123(2) CBE. Une telle interdiction générale semble être directement en conflit avec ce qui est dit dans la décision G 1/93 de la Grande Chambre de recours (cf. points 16 et 17 de cette décision cités ci-dessus), qui envisage clairement la possibilité que certaines limitations de revendications non fondées sur la divulgation initiale ne soient néanmoins pas contraires à l’article 123(2) CBE.

2.2.3 La décision T 323/97 tend à s’appuyer sur l’avis G 2/98 de la Grande Chambre de recours (JO OEB 413, 2001) en ce qui concerne le sens de l’expression “même invention” pour reconnaître la priorité en vertu de l’article 87 CBE. Or, pour la Chambre, l’avis G 2/98 ne fournit pas un tel appui. Il affirme, en son point 10 :

“10. Dans la décision G 1/93 “Caractéristique restrictive/ADVANCED SEMICONDUCTOR PRODUCTS” (JO OEB 1994, 541), dans laquelle il est question des exigences contradictoires des paragraphes 2 et 3 de l’article 123 CBE, il est établi une distinction entre les caractéristiques qui apportent une contribution technique par rapport à l’objet de l’invention revendiquée, et celles qui, sans apporter une telle contribution, ne font qu’exclure de la protection une partie de l’objet de l’invention revendiquée par la demande telle que déposée. La situation juridique est donc complètement différente dans cette décision.”

2.2.4 L’avis G 2/98 ne semble pas mettre en doute les constatations de la décision G 1/93 et affirme traiter une situation juridique complètement différente de ce celle dont il est question dans la décision G 1/93. Celle- ci, quoique portant essentiellement sur le conflit possible entre les dispositions des paragraphes 2 et 3 de l’article 123 CBE, contient néanmoins des considérations (cf. ses points 16 et 17 cités ci-dessus) sur les disclaimers dépourvus de fondement dans la demande initiale, alors que l’avis G 2/98 porte sur une situation juridique différente. Ce serait une extrapolation hardie de l’avis G 2/98 que de conclure qu’il est pertinent pour les disclaimers, a fortiori qu’il est plus pertinent que la décision G 1/93, et la Chambre n’est pas convaincue qu’une telle interprétation soit correcte.

2.2.5 En outre, la décision T 323/97 n’aborde pas les disclaimers se rapportant à des documents compris dans l’état de la technique au sens de l’article 54(3) CBE, ce qui réduit davantage encore la force convaincante qu’elle est susceptible d’avoir. L’existence de cette décision ne donne à la Chambre aucune raison de douter que la jurisprudence constante exposée au point 2.1.1 ci-dessus soit appropriée ou correcte, son applicabilité devant être, comme il est dit dans la décision G 1/93 de la Grande Chambre de recours, appréciée au cas par cas. Une interdiction générale des disclaimers ne serait pas équitable pour les demandeurs confrontés à un état de la technique au sens de l’article 54(3) CBE. Etant donné que la jurisprudence constante, telle qu’elle est consacrée par la Grande Chambre de recours, donne déjà une réponse claire, la Chambre ne voit pas de raison de soumettre une question de droit à la Grande Chambre de recours en l’espèce.

2.2.6 Même si la Chambre était encline, ce qui n’est pas le cas, à s’écarter de la jurisprudence constante en matière de disclaimers, elle estime qu’il serait plus approprié qu’une telle divergence soit induite par le législateur, lequel pourrait déterminer quel droit devrait être applicable dans le cas des nombreux brevets qui ont été délivrés avec des disclaimers fondés uniquement sur l’état de la technique. Pour éviter une longue période d’insécurité juridique, l’existence même de cette pratique établie semble être une raison de ne pas chercher à la modifier autrement que par l’intermédiaire du législateur.

2.2.7 Certaines parties à la présente procédure ont souhaité que la Grande Chambre de recours soit saisie d’une question relative aux disclaimers. Elles n’ont toutefois pas proposé de formulation d’une telle question ou exposé en quoi une telle saisine s’imposait en vertu de l’article 112 CBE, et encore moins fourni d’analyse juridique pertinente pour la question.

Il n’y a au demeurant pas d’autre raison procédurale pour laquelle il serait approprié, à ce stade de la procédure, de saisir la Grande Chambre de recours d’une question de droit relative aux disclaimers.

2.2.8 Les parties ont renvoyé la Chambre au procès-verbal de la procédure orale de l’affaire T 507/99 en instance devant une autre chambre, dans lequel il est déclaré : “La Chambre saisira la Grande Chambre de recours d’une question relative à l’admissibilité des “disclaimers”. A la date de la procédure orale tenue devant la présente Chambre, il n’avait pas encore été statué dans l’affaire T 507/99, si bien que la question à poser et la position adoptée par cette autre chambre n’étaient pas encore connues. Comme elle approuve la jurisprudence constante, la présente Chambre n’a pas considéré que cette affaire en instance constituait un motif adéquat pour qu’elle- même soumette une question de droit ou suspende la procédure au moins jusqu’à ce que la formulation d’une telle question soit connue.

3. Revendication 1 selon la requête principale du jeu B

3.1 Clarté

3.1.1 Les intimés ont contesté que la revendication 1 réponde à l’exigence de clarté selon l’article 84 CBE, vu la présence de désignations commerciales et les données relatives à la viscosité dans le libellé de la revendication 1.

Plus particulièrement, les intimés ont fait valoir que pour pouvoir établir si une composition particulière comprise dans l’état de la technique est couverte par le disclaimer correspondant, il est d’une importance décisive de savoir comment la viscosité a été mesurée. Le brevet en litige n’indiquant pas comment les données de viscosité des compositions exclues par le disclaimer ont été obtenues, ils ont allégué qu’il n’était pas possible de définir l’étendue de l’objet revendiqué.

3.1.2 Ces données de viscosité sont celles mentionnées pour les essais témoins A, B, I et J et les exemples 1 à 11 du document (5). Bien que ce document n’indique pas comment les données de viscosité exprimées en unités SI ont été mesurées, la Chambre n’est pas convaincue de la pertinence de l’objection soulevée par l’intimé, car il n’a pas été contesté qu’il s’agit d’unités de la pratique internationale. La règle 35(12) CBE n’exige rien de plus. De surcroît, au cours de procédure orale, les intimés ont dû admettre ne pas être en mesure de prouver que, faute d’indications sur la manière dont il y a lieu de mesurer les viscosités, l’homme du métier était incapable de déterminer quelles compositions étaient exclues par le disclaimer. Comme il incombe à la partie qui fait une allégation de prouver que celle-ci est exacte, la Chambre estime qu’il n’y a pas lieu d’examiner une telle allégation non fondée. Par conséquent, l’objection de défaut de clarté des données de viscosité ne saurait être retenue.

3.1.3 Se référant à la décision T 480/98, les intimés ont également soutenu que la présence de désignations commerciales n’est pas admissible dans le libellé d’une revendication, étant donné qu’elles le rendent obscur. Ils ont en particulier fait valoir que deux variantes du produit Mobil P51 étaient disponibles dans le commerce à la date de dépôt de la demande ayant donné lieu au brevet en litige et que, en conséquence, le terme “Mobil P51” était ambigu.

3.1.4 Or, dans le cas précis de la décision T 480/98, la chambre compétente a estimé que la désignation commerciale qui avait été utilisée n’avait pas de sens technique clair et qu’il n’apparaissait pas clairement comment un matériel défini uniquement par la désignation commerciale différait d’un quelconque autre matériel. La désignation commerciale n’ayant donc pas un sens technique clair et non équivoque, la chambre compétente a jugé inadmissible sa présence dans une revendication.

En la présente espèce, les compositions exclues par le disclaimer (a) sont définies non seulement par les désignations commerciales respectives Mobil P51 et Mobil P41, mais encore par la nature chimique de l’ester qu’elles contiennent et par leurs données de viscosité. Dans les disclaimers (b) et (c), les compositions exclues sont définies non seulement par les désignations commerciales Mobil P51 et Mobil P41, et donc implicitement par la nature chimique de leur ester et par leurs données de viscosité, mais aussi par la nature chimique des produits désignés par P-2000, CP700, EDA 511 et CP1406 ainsi que par les données de viscosité des mélanges de Mobil P51 ou Mobil P41 avec P-2000, CP700, EDA 511 et CP1406.

Par conséquent, les compositions à exclure par les disclaimers sont en fait définies non pas simplement par leurs désignations commerciales, mais aussi par leur nature chimique et leurs données de viscosité. Ainsi, pour déterminer laquelle des deux variantes du produit Mobil P51 doit être exclue par le disclaimer, à savoir celle mentionnée dans le document (5), les renseignements correspondants concernant la nature chimique et la viscosité doivent être associés à la désignation commerciale “Mobil P51” en vue de définir sans ambiguïté les compositions qui sont divulguées dans le document (5).

Aussi la présente affaire n’est-elle pas comparable avec la décision T 480/98, mais plutôt avec la décision T 623/91, où la chambre compétente a conclu que, dans les circonstances de l’espèce, la désignation commerciale n’introduisait pas d’insécurité. La question de savoir si des désignations commerciales sont admissibles dans le libellé des revendications est une question de fait à laquelle on ne peut répondre qu’au cas par cas.

3.2 Nouveauté

3.2.1 Le document (5), qui était incontestablement compris dans l’état de la technique au sens de l’article 54(3) CBE, décrit des compositions lubrifiantes qui sont miscibles dans des réfrigérants à base d’hydrofluorocarbures et d’hydrochlorofluorocarbures, et qui sont composés d’un polyéther polyol et d’un ester provenant d’alcools polyhydriques avec des acides alcanoïques ou provenant d’acides alcanedioïques avec des alcanols (cf. page 2, lignes 32 à 51).

Les essais témoins A, B, I et J figurant dans le tableau I et les exemples 1 à 11 figurant dans le tableau II divulguent incontestablement des compositions du 1,1,1,2- tétrafluoroéthane comportant des lubrifiants particuliers qui sont couvertes par la portée générale de la revendication 1, mais explicitement exclues par les disclaimers (a), (b) et (c), comme indiqué en détail plus haut. La nouveauté ne peut donc plus être attaquée avec succès sur la base de ces compositions particulières comprises dans l’état de la technique.

3.2.1.1 Les intimés ont fait valoir que les revendications 4, 5, 7 et 8 du document (5) devaient être considérées ensemble lors de l’appréciation de la nouveauté et que leur enseignement combiné divulguait des compositions contenant une quantité majeure de 1,1,1,2- tétrafluoroéthane (mentionné expressément à la revendication 7) et une quantité mineure de tétraesters du pentaérythritol provenant d’un mélange d’acides alcanoïques comportant 7 à 9 atomes de carbone (mentionné expressément à la revendication 8).

Toutefois, selon la jurisprudence constante, la divulgation faite par un document de brevet n’englobe pas la combinaison de caractéristiques isolées revendiquées dans des revendications dépendantes séparées si cette combinaison n’est pas étayée par la description (cf. décision T 42/92, point 3.4 des motifs).

Dans la présente espèce, les revendications 7 et 8 dépendent chacune de la revendication 4 et ne font aucune référence l’une à l’autre. En outre, la description ne comporte qu’une déclaration générale, à la page 3, lignes 31 à 33, indiquant que l’ester préféré est un tétraester du pentaérythritol provenant d’un mélange d’acides alcanoïques comportant 7 à 9 atomes de carbone, sans préciser si cet ester convient comme lubrifiant pour des réfrigérants à base d’hydrofluorocarbures ou d’hydrochlorofluorocarbures. Par conséquent, la combinaison de l’objet de la revendication 7 avec celui de la revendication 8 n’étant pas étayée par la description, aucune composition actuellement revendiquée n’est divulguée par les revendications 4, 5, 7 et 8.

3.2.1.2 Les intimés ont également allégué qu’il découlait clairement de l’enseignement général de la page 2, lignes 32 à 51 du document (5) que n’importe quel ester provenant d’alcools polyhydriques et d’acides alcanoïques ou d’acides alcanedioïques et d’alcanols conviendrait comme lubrifiant destiné à des réfrigérants à base d’hydrofluorocarbures. Etant donné que les esters cités de la page 2, ligne 52 à la page 3, ligne 2 et les esters de formule (I) de la présente revendication 1 se chevauchent clairement et que le triheptanoate de triméthylolpropane et le tétraheptanoate du pentaérythritol y sont expressément cités, les intimés ont soutenu que la présente revendication 1 était dépourvue de nouveauté.

De l’avis de la Chambre, pour être destructeur de nouveauté, le chevauchement entre les divulgations doit résulter du recoupement du même objet ; il ne suffit pas que le chevauchement soit simplement hypothétique ou virtuel en ce sens qu’une divulgation donnée est simplement couverte ou englobée par une divulgation plus large. Pour apprécier la nouveauté dans la présente espèce, peu importe donc qu’il y ait un chevauchement hypothétique ou virtuel entre la description générale des esters divulgués dans le document (5) et des esters de formule (I) selon la présente revendication 1. En d’autres termes, pour être destructrices de nouveauté, toutes les caractéristiques de la combinaison revendiquée doivent pouvoir être déduites directement et sans ambiguïté de l’enseignement du document (5).

Toutefois, pour obtenir les compositions revendiquées, plusieurs choix indépendants doivent être opérés entre des options mutuellement indépendantes, à savoir i) le choix, parmi les hydrofluorocarbures et les hydrochlorofluorocarbures, d’un hydrocarbure contenant du fluor, comportant 1 ou 2 atomes de carbone et où le fluor est le seul halogène (cf. document (5), page 2, lignes 32 et 33), ii) le choix d’un ester provenant d’alcools polyhydriques avec des acides alcanoïques comportant de 4 à 18 atomes de carbone (cf. document (5), page 2, ligne 55 et page 3, ligne 1) et enfin le choix, dans ce groupe d’esters, de ceux répondant à l’exigence qu’au moins un R1 représente un atome d’hydrogène, un radical hydrocarbyle linéaire inférieur contenant jusqu’à 7 atomes de carbone ou un hydrocarbyle à chaîne ramifiée contenant jusqu’à 20 atomes de carbone, ou un radical hydrocarbyle contenant un acide carboxylique ou un ester d’acide carboxylique.

Par conséquent, la combinaison revendiquée ne peut être déduite directement et sans ambiguïté de la divulgation générale du document (5).

3.2.1.3 Se référant au principe énoncé dans la décision T 188/93 (JO OEB 1984, 555), les intimés ont de surcroît fait valoir que la simple exclusion des compositions expressément exemplifiées ne rendait pas la revendication 1 nouvelle.

Dans l’affaire T 188/83, toutefois, le procédé de production chimique revendiqué était identique à celui décrit dans un document de l’état de la technique pour toutes les caractéristiques, à l’exception du choix d’un domaine plus étroit pour l’une d’entre elles. Comme ce document comportait des exemples de plusieurs procédés compris dans ce domaine plus étroit, la chambre compétente a conclu que la nouveauté du domaine nouvellement revendiqué était détruite.

Cette affaire n’est pas comparable à la présente espèce, où non seulement les compositions revendiquées diffèrent par la sélection d’un domaine plus étroit pour une des caractéristiques, mais où, en outre, un certain nombre de choix indépendants doivent être opérés dans le document (5) afin d’obtenir les compositions revendiquées (cf. point 3.2.1.2 ci-dessus). Etant donné que les compositions revendiquées, dans leur définition générale, ne peuvent être déduites directement et sans ambiguïté de l’enseignement général du document (5), la revendication 1 peut être rendue nouvelle par rapport à cet enseignement simplement en excluant par disclaimer les compositions expressément exemplifiées.

Dès lors, en l’espèce, l’exclusion par disclaimer des compositions particulières correspondant aux essais témoins A, B, I et J figurant dans le tableau I ainsi qu’aux exemples 1 à 11 figurant dans le tableau II du document (5) rend la revendication 1 nouvelle par rapport E la divulgation du document (5).

3.2.2 Le document (30), dont il n’a pas été contesté qu’il est compris dans l’état de la technique au sens de l’article 54(3) CBE, décrit des huiles lubrifiantes I à VI compatibles avec des hydrocarbures contenant de l’hydrogène et du fluor, tels que le 1,1,1,2- tétrafluoroéthane, le 1,1-dichloro-2,2,2-trifluoroéthane, le 1-chloro-1,1-difluoroéthane, le 1,1-difluoroéthane, le chlorodifluorométhane et le trifluorométhane (cf. page 2, lignes 6 à 12 ; page 3, ligne 49 et page 15, lignes 15 à 19).

3.2.2.1 Tout en ne contestant pas qu’aucune des compositions revendiquées n’était expressément décrite dans l’un des exemples, les intimés ont allégué que le document (30) était néanmoins destructeur de nouveauté pour la revendication 1, puisque certaines des huiles lubrifiantes I à VI contenaient des esters carboxyliques de formule (I) selon la présente revendication 1 et qu’il ressortait clairement, par exemple à la page 3, lignes 39 à 41, que chaque huile lubrifiante décrite pouvait être combinée avec des fluorocarbures contenant de l’hydrogène tels que le 1,1,1,2-tétrafluoroéthane.

Plus particulièrement, les intimés ont fait valoir que les compositions revendiquées pouvaient être déduites directement et sans ambiguïté de la page 14, lignes 37 à 39, où l’ester provenant de triméthylolpropane et de l’acide caproïque, l’ester provenant du pentaérythritol et de l’acide propionique, l’ester provenant du pentaérythritol et de l’acide caproïque ainsi que l’ester provenant du triméthylol propane et de l’acide adipique étaient expressément décrits comme étant des composants appropriés de l’huile lubrifiante VI.

3.2.2.2 Néanmoins, à la page 15, lignes 15 à 20, il est énoncé que les huiles lubrifiantes présentent une bonne compatibilité avec les fluorocarbures contenant de l’hydrogène (fluoroalcanes contenant de l’hydrogène), des hydrocarbures contenant du chlore en sus du fluor étant également cités à titre d’exemple en plus de ceux qui ne contiennent que le fluor comme seul halogène. La divulgation du document (30) ne se limite donc pas aux huiles lubrifiantes convenant aux fluorocarbures contenant de l’hydrogène dans lesquels le fluor est le seul halogène.

En outre, pour obtenir une composition selon la revendication 1, plusieurs choix ont dû être opérés, à savoir i) sélection, parmi les hydrocarbures contenant du fluor, d’un hydrocarbure dans lequel le fluor est le seul halogène, ii) sélection de l’huile VI parmi six classes d’huiles lubrifiantes définies de manière générale et susceptibles de convenir et iii) sélection, dans la classe d’huiles VI définie de manière générale, de celles contenant les esters décrits à la page 14, lignes 37 à 39.

Plusieurs choix indépendants ayant dû être opérés parmi des options mutuellement indépendantes, la combinaison revendiquée ne peut être déduite directement et sans ambiguïté de la divulgation sur laquelle s’appuient les intimés.

A cet égard, les intimés ont invoqué les principes énoncés dans la décision T 12/90. Dans cette décision toutefois, la totalité de l’enseignement commun avec les revendications devait en substance être exclu, étant donné que la combinaison particulière de substituants, telle que définie dans la revendication à la base de cette décision, était divulguée dans un document de l’état de la technique. Comme dans la présente espèce les compositions revendiquées ne peuvent être déduites directement et sans ambiguïté du document (30), l’affaire T 12/90 n’est pas comparable au présent cas.

3.2.2.3 Les intimés ont également argué que des esters de formule (I) selon la présente revendication 1 étaient divulgués par les dérivés polyoxyalkylèneglycol de formule (I) de l’huile lubrifiante I décrits de la page 3, ligne 54 à la page 4, ligne 2, y compris la divulgation de polyoxyalkylèneglycol de formule (C2) décrits à la page 7, lignes 6 à 9, et par les dérivés polyoxyalkylèneglycol de formules (IX) ou (X) décrits de la page 12, ligne 51 à la page 13, ligne 45.

Par contre, et pour les mêmes raisons que celles mentionnées au point 3.2.1.2 ci-dessus, il n’est pas possible d’en déduire directement et sans ambiguïté des esters selon la présente revendication 1, où au moins un R1 représente un atome d’hydrogène, un radical hydrocarbyle linéaire inférieur contenant jusqu’à 7 atomes de carbone ou un hydrocarbyle à chaîne ramifiée contenant jusqu’à 20 atomes de carbone, ou un radical hydrocarbyle contenant un acide carboxylique ou un ester d’acide carboxylique.

Par conséquent, la combinaison revendiquée ne peut être déduite directement et sans ambiguïté de la divulgation du document (30) sur laquelle s’appuient les intimés.

3.2.3 Le document (2) décrit un fluide actif destiné à un dispositif de réfrigération ayant un hydrocarbure aliphatique halosubstitué contenant du fluor, comme réfrigérant, et un lubrifiant comprenant un ester du pentaérythritol et d’un acide organique (cf. colonne 1, lignes 37 à 43). Par ailleurs, aux lignes 23 à 29 de la colonne 2, il est indiqué que le réfrigérant comprend de préférence un dérivé halofluoré d’un hydrocarbure aliphatique du type divulgué dans le document (3), tel que le trichlorofluorométhane, le dichlorofluorométhane et le difluoromonochloroéthane.

En revanche, dans les compositions présentement revendiquées, le fluor est le seul halogène dans les hydrocarbures contenant du fluor.

Les intimés n’en ont pas moins estimé que les compositions revendiquées étaient divulguées dans le document (2), puisque celui-ci, selon la présente revendication 1, divulgue aussi bien des esters que des hydrocarbures contenant du fluor. Il est en effet indiqué à la colonne 3, lignes 24 à 30 du document (2) que les esters peuvent être obtenus en faisant réagir le pentaérythritol avec des acides organiques, tels que l’acide n-butyrique, l’acide n-valérique et l’acide caprylique. D’autre part, la page 1, lignes 31 à 54, en combinaison avec les données des figures 1 et 2 du document (3) qui est explicitement mentionné dans le document (2), enseigne que par dérivé halofluoré d’un hydrocarbure aliphatique, il faut entendre des dérivés contenant plus d’un atome de fluor, avec ou sans autre atome d’halogène, et que les hydrocarbures sans aucun halogène autre que le fluor avaient des propriétés avantageuses.

Le document (2) ne mentionne cependant que des hydrocarbures contenant à la fois du fluor et du chlore (cf. colonne 2, lignes 23 à 29, et colonne 4, lignes 15 à 23) et ne fait nulle part état d’hydrocarbures aliphatiques halofluorés où le fluor est le seul halogène. Ne fût-ce que pour cette raison, les compositions comprenant un ester d’acide carboxylique selon la présente revendication 1 et un hydrocarbure fluoré où le fluor est le seul halogène ne sont pas divulguées dans le document (2), lequel, en conséquence, ne peut être considéré comme destructeur de nouveauté pour la présente revendication 1.

De surcroît, le fait que le document (3) décrit aussi, comme option parmi plusieurs, des hydrocarbures fluorés où le fluor est le seul halogène, n’autorise pas à conclure que la combinaison d’un ester carboxylique selon la présente revendication 1 et d’un hydrocarbure fluoré où le fluor est le seul halogène peut être déduite directement et sans ambiguïté de l’enseignement du document (2).

4. Revendication 13 selon la requête principale du jeu B

Pour les mêmes motifs que ceux qui s’appliquent à la revendication 1 selon la requête principale, la Chambre conclut qu’il est satisfait à l’exigence de clarté et que l’objet revendiqué est nouveau par rapport à l’enseignement de chacun des documents (2), (5) et (30).

DISPOSITIF

Par ces motifs, il est statué comme suit :

1. La décision attaquée est annulée.

2. L’affaire est renvoyée à la première instance pour poursuite de la procédure sur la base de la requête principale contenue dans le jeu B déposé par lettre du 7 août 2002.